L’incendie de Notre-Dame de Paris a brutalement ramené au premier plan de la scène patrimoniale les compagnons « du Tour de France » ou « du Devoir ». Sous le coup de l’émotion, l’emballement médiatique et les réseaux sociaux ont produit une surenchère d’articles les concernant, mélangeant les aspects historiques avec les questions relatives à la formation et aux métiers manuels. Quelques compagnons ont par ailleurs largement contribué à « sourcer » des idées et des chiffres pour le moins erronés, où l’on saute sans preuve les siècles pour relier sans solution de continuité les bâtisseurs de cathédrales aux compagnonnages actuels, s’accaparant ainsi l’héritage prestigieux des Anciens sur le fond ambigu d’une sacralité des savoirs traditionnels.

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Passé le choc émotionnel, et en attendant un article en cours de rédaction où je vous ferai part de mes réflexions quant à l’incendie de Notre-Dame de Paris et au rôle que pourraient jouer les compagnons dans sa restauration, je partage ici le communiqué suivant dont l’esprit est tout à fait conforme à ma pensée, rédigé par le président de la Fédération Compagnonnique Nationale à propos d’un rassemblement de compagnons prévu le dimanche 21 avril.

Jean-Michel Mathonière

À TOUS LES COMPAGNONS
DE LA FÉDÉRATION COMPAGNONNIQUE

Copie aux présidents de l’Union Compagnonnique, de l’Association Ouvrière des Compagnons du Devoir, de la Confédération des Compagnonnages Européen.

Nous avons eu connaissance d’un projet de rassemblement des compagnons, suite à l’incendie de la cathédrale Notre Dame de Paris, pour rendre hommage aux bâtisseurs d’hier et d’aujourd’hui, sur le parvis du monument dimanche 21 avril prochain, jours de Pâques.

Cette initiative louable, porté par des compagnons à titre individuel, montre bien l’immense émotion qui a touché l’ensemble de la communauté nationale et internationale, avec une intensité parfois accrue pour les hommes de l’art, descendant par leurs traditions des bâtisseurs de ces ouvrages symboles des capacités humaines en matière de savoir-faire et d’excellence.

Néanmoins, la Fédération Compagnonnique nationale ne s’associera pas à cette manifestation parce qu’aujourd’hui, dans l’effervescence médiatique, il ne lui paraît pas opportun de se livrer à une démonstration qui pourra être interprétée et commentée bien en dehors de la réalité de ce que les compagnons sont et font aujourd’hui.

Toutes les heures, de nouvelles hypothèses et propositions sont annoncées à grand renfort de média pour offrir des solutions réparatrices à l’immense blessure subie par ce monument.

Discrets par essence, et modestes dans leur posture, les compagnons se doivent de ne pas céder à cette déferlante qui risque de les présenter comme ce qu’ils ne sont pas et ce qu’ils ne veulent pas être.

Acteurs dans la cité, héritiers d’une tradition de bâtisseurs exigeante, ils seront bien-sûr présents au côté de tous les acteurs engagés pour relever le défi de la remise en état du monument, dès lors qu’un cadre défini sera proposé par les autorités compétentes.

En attendant, ils proposent de mettre leur engagement et leurs capacités au service des responsables du processus de sauvegarde et de réparation, et demandent à l’ensemble des décideurs à bien prendre en compte l’exceptionnelle opportunité que ce chantier à venir peut-être pour la jeunesse d’aujourd’hui et leur permette à travers la formation et l’emploi d’y être pleinement associés.

La Fédération Nationale s’est déjà régulièrement exprimée sur différents média présentant son regard et ses propositions doit rencontrer dès la semaine prochaine ses homologues des autres associations compagnonnique pour coordonner une réponse compagnonnique représentative.

Dans l’attente de nous retrouver dans les semaines qui viennent sur les « chantiers » qui nous occupent d’ores et déjà, recevez, chers compagnons nos salutations fraternelles.

Le président de la Fédération Compagnonnique Nationale
Jean-Michel DUTREY

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