Je reproduis ici un article rédigé par Laurent Bastard et publié dans l’ancienne version de ce blog le 17 février 2010.
On croyait (presque) tout savoir sur les différents types de couleurs compagnonniques depuis, notamment, la synthèse qu’en avait donnée René Lambert dans les Fragments d’histoire du Compagnonnage en 2004. Or, deux photographies viennent nous interpeller.
La première nous montre un groupe de compagnons serruriers du Devoir, à Tours, devant leur siège qui était alors installé dans un hôtel de la place Saint-Clément. La photo a été prise au début du XXe siècle, et en tout cas avant 1910 puisqu’ils transférèrent leur siège à cette époque au café Breton, 9 place des Halles.
Sur ce cliché, le rouleur, identifiable à sa canne enrubannée, porte sa couleur unie (type Sainte-Baume large) à la boutonnière mais aussi une couleur plus petite qui semble bien être une couleur fleurie, comme en portaient à cette époque les compagnons passants tailleurs de pierre, autour de leur chapeau (voir la photo du compagnon Berge dans un article antérieur). Le groupe de seize compagnons et aspirants, rassemblés autour de leur Mère, comprend un autre compagnon, tout jeune, qui est aussi porteur de ce type de couleur, et seulement de celle-ci.
La seconde photo a été prise à la Saint-Pierre 1932, à Tours également.
Vingt-et-un compagnons sont réunis aux côtés de leur Mère. On distingue les trois préposés au service du banquet, revêtus, comme le voulait encore la tradition, d’un bonnet de coton blanc. Et là aussi, on remarque que deux compagnons serruriers ont accroché à leur boutonnière des couleurs fleuries de tailleurs de pierre.
Cette fête a donné lieu à un article paru dans Le Compagnon du tour de France n° 36, du 15 août 1932. Il informe les lecteurs que 22 compagnons serruriers étaient présents (l’un d’eux a dû partir avant la photo) et que deux jeunes ont été reçus, les nommés Albert Mabire, Le Beauceron, 24 ans, et Boissier, le Blois, 19 ans. Ces deux jeunes gens venaient d’achever leur troisième année de cours de serrurerie, ajustage et forge dispensés par la Société protectrice des apprentis d’Indre-et-Loire.
Ces deux photos appellent des questions. D’abord, s’agit-il bien de couleurs fleuries ? Et ensuite : étaient-ce des couleurs de tailleurs de pierre ? En quelles circonstances et pourquoi les compagnons serruriers, jusque dans les années 1930, portaient-ils ce type de couleurs, dont on voit bien la différence avec celles qui sont portées par les autres compagnons ? Pourrait-il s’agir de couleurs prêtées par des tailleurs de pierre, juste pour la photo, faute de disposer de couleurs unies ? Cela semble douteux à trente ans d’écart. Pourquoi seulement deux compagnons en sont-ils revêtus ? Est-ce lié à une fonction particulière ? Pourquoi le rouleur en porte-il une en plus de sa couleur unie ?
Une chose est sûre : il est exclu que des compagnons tailleurs de pierre se soient joints aux serruriers, vers 1900 et en 1932, d’une part parce qu’ils les auraient portées à leur chapeau et non à la boutonnière, et d’autre part parce que l’article précité ne mentionne que la présence de compagnons serruriers durant la Saint-Pierre 1932.
Quelqu’un pourrait-il apporter des réponses à ces questions ? Merci d’avance.
Cet article ne reçut à l’époque aucun commentaire venant apporter des éléments de réponse aux questions posées. Vous pouvez me contacter pour apporter votre contribution (afin d’éviter les pollutions diverses, la fonction commentaire est désactivée).
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